FOIRE AUX QUESTIONS DE fr.sci.maths           CHAPITRE I: CONTRADICTIONS

 


I-3. 0^0 = 1

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Par convention, les mathématiciens posent que zéro à la puissance zéro est égal à un (0^0=1). Mais, si l'on recherche pourquoi une telle chose, on se retrouve face à un grand nombre de problèmes. N'oubliez pas, ce n'est qu'une convention, et il peut être utile de poser 0^0=0. a) Approche topologique. -- Définition par continuité. On prendra comme définition de la puissance, la formule : pour tous nombres réels x,y (avec x>0) x^y = exp[y ln(x)]. Une approche par continuité pose problème. En effet, on peut choisir trois fonctions {x->x^0} ; {y->0^y} ou {x->x^x} pour approcher par continuité (en passant à la limite) la valeur 0^0. Or l'on a, pour tout nombre réel x non-nul x^0 = exp[0 ln(x)] = 1. En prolongeant, par continuité, cette fonction quand x tend vers zéro, on trouve: 0^0 = 1. Si pour tout nombre réel y non-nul, on prolonge par continuité la fonction y->x^y pour x=0. Et quand y tend vers zéro, on trouve: 0^0 = 0. En outre, pour tout nombre réel x strictement positif, on a x^x = exp[x ln(x)]. On cherchera, alors, la limite en zéro par valeurs positives, notée 0+. Et l'on a donc : Lim x^x = Lim exp[ x ln(x) ] = 1 car Lim x ln(x) = 0 et exp[0]=1. x->0+ x->0+ x->0+ Il vient, donc : 0^0 = 1. La question se pose alors : quelle valeur choisir pour 0^0 ? -- Problèmes liés à cette définition. Soit f une fonction continue définie sur un intervalle I contenant 0 et telle que pour tout x appartenant à I, f(x) > 0. Soit g une fonction définie sur un intervalle J contenant 0. On supposera également que Lim f(x) = Lim g(x) = 0 x->0+ x->0+ On peut alors écrire pour tout x appartenant à I inter J f(x)^g(x) = exp[ g(x) ln(f(x))]. On constatera aisément que l'on est en présence d'une forme indéterminée et donc qu'en choisissant convenablement f et g on peut trouver n'importe quelle valeur réelle positive finie, en passant à la limite par valeurs supérieures. Par exemple, soit A un réel strictement positif. Il suffit de choisir f(x) = exp(-A/x) et g(x) = x + x² On a bien les conditions voulues et on a f(x)^g(x) = exp[(x + x²)ln(exp(-A/x)] = exp[-A (x+x²)/x]. C'est-à-dire : f(x)^g(x) = exp[-A(1+x)] Et de là: Lim f(x)^g(x) = Lim exp[-A(1+x)] = exp[-A] x->0+ x->0+ Ainsi en choisissant convenablement A, on peut trouver comme limite n'importe qu'elle valeur réelle comprise entre 0 et 1. En gardant f et en prenant g(x)= -( x + x²) on va trouver une limite supérieure à 1. On notera, néanmoins, que si l'on choisit une fonction {u : R ->R+} telle que sa limite soit nulle quand x tend vers zéro par valeurs positives, on a alors : u(x)^u(x) = exp[ u(x) ln(u(x)) ] et par composition des limites on trouve: Lim u(x)^u(x) = Lim exp[ u(x) ln(u(x)) ] = exp[0] = 1 x->0+ x->0+ En effet, l'on a bien : Lim u(x) ln(u(x)) = Lim X ln(X) = 0 x->0+ X->0+ en effectuant le changement de variable X = u(x). b) Approche algébrique. On peut, pour essayer de comprendre pourquoi 0^0=1, revenir à la définition donnée dans les petites classes de la fonction puissance notée ^. Soit maintenant comme définition de la puissance: x^n = x * x *...* x (n fois) Le nombre réel x est multiplié n fois par lui-même avec n un nombre entier. Alors cette définition nous amène à la relation suivante: Pour tous entiers n et m on a: x^(n + m) = (x^n)(x^m) [1] Si on prend m=0 et n différent de zéro, alors on a x^n = (x^0)(x^n). Si x est différent de zéro, alors cela implique que x^0 = 1. Il est alors très tentant d'étendre la relation à x = 0, et donc: 0^0=1 On notera que, si l'on pose 0^0=0, alors la relation reste vraie. De plus la relation [1] implique la relation suivante: (x^n)^m = x^(n*m) [2] Encore une fois, si on prend n=0 dans la relation précédente on trouve (x^0)^m = x^0. Et il est encore très tentant, pour x non nul, de prendre x^0 = 1 et d'étendre cette relation à x = 0. Mais on peut tout à fait prendre comme convention 0^0=0, sans que la relation en soit modifiée. c) Approche ensembliste. Il faut d'abord définir qu'est ce qu'on entend par addition, multiplication et puissance. -- Qu'est ce que l'addition ? On prend deux ensembles disjoints A et B ayant chacun |A| et |B| éléments (lire 'cardinal' de A et 'cardinal' de B). Et bien l'addition de |A| et |B|, c'est ce qu'on obtient en mettant ensemble les éléments de A et B : |A| + |B| = |A union B| -- Qu'est ce que la multiplication ? Si on veut dire 3.|A|, ça veut dire qu'on compte trois fois chaque élément de A. On peut dire ça en disant que pour chaque x dans A on compte (1, x), (2, x) et (3, x). En clair, on compte les éléments de {1 , 2 , 3} x A. Il est facile alors de voir que ce qu'on entend par multiplication, |A| . |B| = |A x B| -- Qu'est ce alors que l'exponentielle ? Calculer |A|^n, c'est donc calculer |A x A x ... x A| (n fois), c'est à dire dénombrer tous les n-uplets d'éléments de A. Pour former un n-uplet, on choisit un premier élément dans A, x(1), puis un deuxième x(2), puis..., puis un n-ième x(n). Et c'est fait. C'est à dire qu'on choisit une application (ici notée x) de {1,2...,n} dans A. On peut alors dire que |A|^|B| = |A^B| où A^B est l'ensemble des applications de B dans A. |A^B|=nombre d'applications de B dans A -- Et 0^0 dans tout ça ? Fort de ces définitions, on peut se demander ce qu'il se passe quand A et B sont vides. Et bien, il existe exactement une application de l'ensemble vide dans lui-même, c'est l'identité. Il apparaît clairement que 0^0 = 1. d) Conclusion. On constate donc que l'approche par continuité, bien qu'apparemment la plus simple, ne conduit qu'à des contradictions. On ne peut donc pas définir 0^0 par des fonctions continues et par passage à la limite. Ainsi, par convention 0^0 est en général égal à 1, parce que cela arrange nombre de formules, notamment celles sur les polynômes. Mais ce n'est pas une généralité. Il peut en effet être plus utile de poser que 0^0=0 dans certains cas. Nous avons vu que cela n'amène aucune contradiction dans la théorie algébrique. N'oubliez pas: c'est juste une convention d'utilité. On notera que le forum anglophone news:sci.maths possède également une " Foire Aux Questions " sur le sujet disponible à l'adresse: http://www.lib.ox.ac.uk/internet/news/faq/sci.math.html.